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«L’Arabie saoudite et l’Égypte ne veulent pas d’une démocratie au Soudan»

La révolution soudanaise est-elle morte lundi 3 juin? Deux mois après la mise à l’écart du dictateur Omar el-Béchir, des manifestations ont été lourdement réprimées. Comment interpréter ces bouleversements? Désalliances cherche à expliquer l’évolution de la crise au Soudan avec Christian Delmet, chercheur à l’Institut des mondes africains.

Quel scénario pour le Soudan? Celui des massacres, de la guerre civile ou d’une nouvelle junte militaire? Quasiment deux mois après la mise à l’écart d’Omar el-Béchir, la révolution au Soudan est entrée dans une phase chaotique.

Christian Delmet, ethnologue, chercheur à l’Institut des mondes africains (IMAF) et spécialiste du Soudan, démêle pour Désalliances les raisons de la nouvelle répression de forces armées soudanaises contre les manifestants à Khartoum, mais aussi dans d’autres zones du pays.

Ce spécialiste du Soudan, qui y a vécu et étudié pendant une dizaine d’années, tente de définir les responsabilités de l’armée et des milices paramilitaires et de présenter l’un des hommes troubles du pouvoir, Mohamed Hamdan Dagolo, numéro deux du Conseil militaire de transition, plus connu sous le nom d’Hemetti.

Cet homme, qui est très probablement le responsable de la récente répression violente de manifestations qui a fait des dizaines de morts et des centaines de blessés depuis le 3 juin, est à la tête des Forces de Soutien Rapide (FSR), composées de dizaines de milliers de miliciens, et pourrait être une pièce maîtresse dans une future guerre civile. D’autant plus qu’il entretient des liens forts, tout comme le général Abdel Fattah al-Burhane, aujourd’hui à la tête du pays, avec les puissants parrains du Soudan: l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Égypte. En effet, outre ses récentes rencontres à Riyad, à Abu Dhabi ou encore au Caire, Hemetti a envoyé de nombreux mercenaires, de la «chair à canon», selon l’expression de l’ethnologue, pour mener la guerre au Yémen.

Chrisitian Delmet, qui rappelle le pedigree de ce criminel et son implication dans les massacres au Darfour, expose aussi le jeu de ces pays voisins, bien décidés, selon lui, à empêcher toute formation d’un système plus démocratique au Soudan, en maintenant au pouvoir un régime dictatorial.

Enfin, le spécialiste du Soudan rappelle le passé peu glorieux des pays occidentaux dans la région, notamment dans les génocides du Darfour et met en évidence les liens troubles de ces pays avec les hommes forts qui se succèdent à la tête du Soudan. En effet, les États-Unis, le Royaume-Uni et la France sont de grands fournisseurs d’armement à Khartoum depuis des années. Quant à l’Union européenne, elle pourrait porter une lourde responsabilité dans les troubles actuels et futurs, notamment à cause de la mission de contrôle migratoire confiée à Hemetti et à ses forces au Soudan.


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